Football féminin : Les coupes du monde officieuses

Si la Coupe du monde de football féminin édition 2019, qui se déroule actuellement en France, bat son plein et intéresse plus que jamais tant le grand public que les passionnés de football, il n’en a pas toujours été ainsi. En atteste l’ouvrage du journaliste Thibault Rabeux, Football féminin : Les coupes du monde officieuse, lequel retrace à travers son récit l’histoire souvent mouvementées des compétitions internationales de football féminin des années 70 à 90, prémisses indispensables à leur reconnaissance institutionnelle et officielle.

Editeur : Auto-édition
Sortie : 31 mai 2019
Auteur : Thibault Rabeux

Football féminin : Les coupes du monde officieuses – Avis

La première Coupe du monde féminine fut organisée en 1991 en Chine, soit plus de soixante ans après la première édition masculine. Et si la compétition chinoise était loin de connaître la reconnaissance médiatique et sportive dont jouissent aujourd’hui les nouvelles itérations, elle avait au moins le mérite de bénéficier de l’appui officiel de la FIFA. Car l’institutionnalisation d’une compétition internationale officielle de football féminin aura été aussi longue que mouvementée. La fédération aujourd’hui présidée par Gianni Infantino a en effet longtemps refusé d’organiser sa propre coupe du monde. Tout naturellement, d’autres organisations ont profité du vide ainsi laissé lors des années 1970 à 1990 pour tenter de bénéficier d’un filon qu’ils ont au moins eu le mérite de sentir. En découle des compétitions hors du commun tentant de réunir tant bien que mal le plus de représentants nationaux possibles, se tenant dans des cadres souvent inattendus et orchestrés par des organisateurs aux intentions et choix discutables.

La génèse de la coupe du monde féminine de football

Football féminin : Les coupes du monde officieuses est l’œuvre du journaliste Thibault Rabeux, anciennement rédacteur pour Footdelles.com – site dédié à l’actualité et à la promotion du football féminin. Fruit de l’auto-édition et premier ouvrage de l’auteur, le livre revient sur chacune de ses coupes du monde officieuse, en déroule successivement la genèse puis les évènements principaux, les unes après les autres. L’occasion de voyager à travers le monde, du premier Mundial 1971 au Mexique, organisés par des hommes d’affaires italiens plus ou moins véreux, à l’International Women’s Football Tournament de 1988 initiée par la prise de parole mémorable d’’Ellen Wille – « mère du football norvégien » – devant les 150 hommes composant le congrès de Mexico de la FIFA de 1986, en passant par le Xi’an’s Women Tournament de 1984, fruit d’un conflit géopolitique entre les « deux Chines » de l’époque. Le récit, s’étalant sur une « petite » soixantaine de pages, oscille ainsi entre anecdotes d’organisations croustillantes et admirables épopées humaines et sportives. Morceaux choisis.

De l’ombre à la lumière

Comment la jeune danoise Susanne Augustesen, quinze ans, s’est-elle retrouvée à inscrire un triplé en final d’un mondial devant 110.000 spectateurs mexicains survoltés ? Une longue histoire, que l’on doit avant tout à un groupe d’homme d’affaires italiens dont le récit des motivations et des choix valent le détour. Entre tirages au sort truqués et volontés d’imposer tenus sexy et salon de beauté dans les vestiaires aux joueuses, ces commerçants ont cela étant réussi le tour de force de réunir lors de trois évènements annuels plusieurs équipes nationales à une époque où cela ne venait encore à l’idée de personne.

Le voyage rocambolesque en Chine des jeunes footballeuses de Dallas, autorisées à manquer trois semaines d’écoles parce que représentantes des Etats-Unis à l’occasion du Xian’s Women Tournament, fut également des plus palpitants. Un road trip surprenant sur fond de guerre d’influence entre les pouvoirs politiques chinois, les différentes fédérations asiatiques et la FIFA. Rien que ça. L’auteur présente les différents tenants et les aboutissants de ces évènements fondateurs, alternant archives de journaux de l’époque et interviews de témoins privilégiés réalisés pour l’occasion. Un travail d’enquête à saluer, servi par un style journalistique sobre et efficace quoique émaillé ici ou là d’une écriture que l’on sent encore jeune et un brin inexpérimentée. Pas de quoi bouder son plaisir pour autant. Voilà simplement la marque d’un auteur talentueux venant à peine de se lancer dans l’édition.

Petites histoires et grands exploits

Outre l’histoire des compétitions, les résultats et le récit des matchs en eux-mêmes occupent une large part d’un ouvrage qui n’omet pas en cela de raconter les premiers pas internationaux d’un sport alors en quête de lettre de noblesse. Chaque tour de coupe du monde est ainsi consigné et commenté avec ferveur et rigueur, office d’historien autant que de passionné. Là encore, des témoignages de joueuses bienvenus viennent entrecouper un récapitulatif des scores parfois un peu fades. Un coup de projecteur nécessaire sur une série d’évènements méconnus et pourtant ô combien fondateur. C’est en effet en observant la dernière des compétitions officieuses organisées en Chine, l’International Women’s Football Tournament de 1988, que le président de la FIFA de l’époque, João Havelange, décidera de lancer une véritable Coupe du monde féminine officielle de football. Football féminin : Les coupes du monde officieuse constitue un ouvrage des plus sympathiques, enquête honorable réunissant un grand nombre d’entretiens inédits qui plaira sans nul doute aux fans de foot féminin et friands d’histoire sportives toutes disciplines confondues.

Le livre dont avait besoin le football féminin ?

👍 Points positifs

• Une enquête solide éclairant un sujet méconnu

• Une multitude de témoignages inédits enrichissant l’histoire du football féminin

• Un agréable récit entre épopée sportive et anecdotes croustillantes

👎 Points négatifs

• Une écriture un peu en dent de scie

• Des résumés sportifs parfois fades et génériques

⚖️ Notre avis final

La littérature dédiée au football féminin n’en finit plus de s’enrichir, depuis quelques années. Avec Football Féminin : Les coupes du monde officieuses, Thibault Rabeux oriente notre regard sur une période méconnue et pourtant cruciale à la reconnaissance et à la construction des compétitions professionnelles féminines. Il livre un ouvrage rythmé, certes un peu court et témoignant d’une plume encore jeune, mais riche en anecdotes, qui participe d’une bien belle manière à l’écriture de l’histoire du football féminin, et donc du sport en général.

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